Myopathie cortisonique

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Un médecin ausculte le bras d'une patiente

La myopathie cortisonique est un effet secondaire de la corticothérapie qui est aujourd’hui bien connu, il l’est depuis les années 1955, peu de temps après l’apparition de ce type de traitement. Il existe des formes aiguës et chroniques de myopathie cortisonique, et si les premières sont faciles à identifier, il n’en est pas de même pour les secondes. En effet, le diagnostic peut être perturbé par le fait que cette myopathie intervient généralement dans des pathologies elles-mêmes susceptibles d’entraîner des troubles musculaires. Mais apprenons-en tout de suite davantage sur la myopathie cortisonique.

Myopathie cortisonique : définition

Comme son nom l’indique, la myopathie cortisonique est une pathologie musculaire provoquée par la prise de cortisone. En effet, la myopathie cortisonique fait partie des effets secondaires de la cortisone, au même titre que la prise de poids, l’hypertension artérielle, la dyslipidémie, l'augmentation des risques d’ostéoporose, de fractures de fragilité ou les troubles cutanés (deux tiers des patients recevant une corticothérapie  systémique prolongée sont gênés voire très gênés dans leur vie quotidienne par ses effets indésirables).

Il s’agit de la plus fréquente des myopathies iatrogènes d’origine médicamenteuse, sachant qu’environ 300 000 Français suivent une corticothérapie au long cours.

Ainsi, entre 15 et 40 % des personnes qui se voient prescrire de la cortisone à haute dose vont développer une myopathie cortisonique. Chez 5 % des patients, cette dysfonction musculaire est véritablement invalidante.

La myopathie cortisonique apparaît, soit suite à de fortes posologies de corticoïdes, soit suite à une corticothérapie à faible dose mais prolongée, notamment lorsqu’elle est à base de méthylprednisolone (0,2 mg/kg/j). Elle est également souvent décrite lorsqu’elle est utilisée avec des glucocorticoïdes fluorés tels que la dexaméthasone.

Les patients les plus touchés semblent être les plus âgés.

Les mécanismes permettant d’expliquer la myopathie cortisonique ont récemment été découverts. Les corticoïdes troublent de nombreuses activités enzymatiques au sein de l’organisme, ce qui se traduit par :

  • une altération du métabolisme des protéines et des glucides ;
  • une modification du transport des ions intracellulaires ;
  • une mauvaise pénétration des acides aminés ;
  • une diminution de la pénétration du calcium à l’intérieur des cellules musculaires ;
  • une augmentation de la destruction des protéines musculaires et une diminution de leur fabrication.

Bon à savoir : la cortisone est prescrite en cas de bronchopneumopathie chronique obstructive, d’asthme (hydrocortisone) et dans de nombreuses pathologies rhumatismales inflammatoires.

 

Symptômes de la myopathie cortisonique

Le symptôme le plus significatif de la myopathie cortisonique est l’atrophie musculaire. Ainsi, l’ensemble des fibres musculaires (ou préférentiellement les fibres IIb) vont être touchées et vont se nécroser. Cela se traduit par une diminution de la force musculaire (de 30 % en moyenne) ainsi que par une diminution de l’endurance et une asthénie. Néanmoins, cela n’entraîne aucune douleur.

Les principales zones touchées sont la base des membres (triceps, muscles de la cuisse mais aussi les muscles pectoraux par exemple) et l’atteinte est généralement symétrique. Une atteinte des tendons est possible mais rare (le risque est augmenté en cas d’utilisation concomitante de fluoroquinolones, une classe d’antibiotiques).

Bon à savoir : la myopathie cortisonique est souvent associée aux autres manifestations du syndrome de Cushing iatrogène (perte de masse musculaire).

Laps de temps avant l’apparition des symptômes

Les troubles musculaires apparaissent dans les semaines qui suivent la première prise de cortisone lorsque celle-ci est comprise entre 1 et 2 mg/kg/jour.

En cas de posologie modérée (15 mg/jour), la myopathie cortisonique chronique débute au moins un mois après la mise en place du traitement.

Le risque de développer une myopathie cortisonique est en lien avec la dose reçue, sachant que le risque d’atteinte musculaire est exceptionnel en dessous de 10 mg/jour et qu’il est très faible au cours des corticothérapies courtes.

Myopathie cortisonique chez les asthmatiques

Dans les cas graves tels que ceux observés chez 15 % des asthmatiques après l’utilisation de très fortes doses d’hydrocortisone, on retrouve une myopathie sévère avec une rhabdomyolyse. Cette dernière se traduit par une importante élévation des taux de myoglobine (protéines) et de créatine phospho-kinase (CPK).

Les muscles respiratoires peuvent également être touchés et perdre de leur force chez les personnes asthmatiques corticodépendantes.

Bon à savoir : en cas d’administration prolongée d’une combinaison cortisone-curare, le nombre de patients concernés passe de 15 à 30 %.

Diagnostic de la myopathie cortisonique

Le diagnostic de la myopathie cortisonique est simple lorsqu’il s’agit de la forme aiguë de la maladie. Les symptômes sont suffisamment significatifs et on constate aisément qu’ils ont fait leur apparition peu de temps après la mise en place d’une corticothérapie.

Myopathie cortisonique : risques d’erreurs diagnostiques

En revanche, les formes chroniques de myopathie cortisonique sont plus difficiles à diagnostiquer. En effet, elles surviennent dans le cadre du traitement de pathologies elles-mêmes responsables de dysfonctions musculaires (myasthénies, polymyosites et dermatomyosites notamment), ce qui a tendance à les faire passer inaperçues.

On peut également passer à côté du diagnostic de myopathie cortisonique chez les personnes ayant été transplantées, la ciclosporine (utilisée en prévention de rejet d’un greffon) étant elle-même susceptible d'induire une myopathie. Dans ces situations, le risque principal est d’intensifier à tort la corticothérapie ce qui serait une grosse erreur.

Examens d'une myopathie cortisonique

Par ailleurs, il n’est pas possible d’avoir systématiquement recours à la biopsie pour établir un diagnostic fiable. Voici les principaux examens réalisables :

  • L’EMG, de son côté, donne à voir des potentiels moteurs de faible amplitude et de brève durée. Toutefois, il arrive qu’il ne mette en évidence aucune anomalie.
  • L’IRM peut également se révéler intéressante dans le cadre d’un dépistage de la myopathie cortisonique.
  • Certains examens sanguins peuvent également constituer une orientation diagnostique puisque la myopathie cortisonique a tendance à entraîner une élévation des taux de LDH et de créatinine dans les urines. En revanche, les enzymes musculaires restent normales.

Au final, en l’absence d’examen et de marqueurs biologiques complètement fiables, la méthode la plus adaptée consiste à surveiller, avant et après l’introduction d’une corticothérapie prolongée, la force des muscles, notamment celle du quadriceps.

Myopathie cortisonique : quel traitement ?

Le seul traitement efficace de la myopathie cortisonique est le sevrage de cortisone (ou en cas d’impossibilité, la diminution de la posologie). Cela permet de récupérer lentement la force musculaire. Il faut compter de quelques jours à quelques semaines, voire mois, pour une rémission complète.

Le cas échéant, il est également recommandé de remplacer les glucocorticoïdes fluorés par des glucocorticoïdes non fluorés comme la prednisone.

La récupération est plus lente lorsque le début de la corticothérapie s’est accompagné d’une immobilisation. Inversement, une activité physique modérée (lorsqu’elle est possible) permet de faire régresser plus rapidement la myopathie cortisonique. Il est donc systématiquement conseillé de réaliser des exercices physiques, une kinésithérapie complémentaire pouvant également être utile chez les personnes âgées.

Bien entendu, pour une prise en charge efficace, c’est le dépistage précoce de la myopathie cortisonique chronique qui est à privilégier. Puisqu’il n’existe pas de marqueurs biologiques, la méthode la plus adaptée consiste à surveiller avant et après l’a mise en place de toutes corticothérapie prolongée la force des muscles respiratoires et du quadriceps.

Bon à savoir : certaines molécules comme le clenbuterol, la nandrolone ou l'hormone de croissance ont montré chez l'animal des effets positifs en termes de trophicité, de force et d'endurance. Des essais sur l’homme sont à l'étude.

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